Un groupe de travail spécialisé dans les blockchains
L’initiative de la Commission fait suite à la proposition du Comité des Affaires Économiques et Monétaires du Parlement Européen de créer un groupe de travail spécial focalisé sur les blockchains et les registres distribués (DLTs), formulée dans un draft report publié le 23 février 2016 sous l’égide de Jakob von Weizsäcker.
Ce rapport présente les différences entre les monnaies cryptographiques pair-à-pair (dénommées VCs pour Virtual Currencies) et les bases de données décentralisées/technologies de registres distribués (DLTs, Distributed Ledger Technologies). Le document évoque ensuite :
- la balance des risques et des opportunités,
- l’emploi des DLTs au-delà des paiements,
- une régulation intelligente visant à favoriser l’innovation et à protéger l’intégrité.
Le plan d’action de la Commission Européenne
Dans un communiqué daté du 23 mars, intitulé “Consumer Financial Services Action Plan: Better Products, More Choice”, la Commission Européenne a dévoilé son plan d’action.
En introduction, le document rappelle les objectifs du marché unique européen : la libre circulation des personnes, services, biens et capitaux. L’une des priorités de la Commission Juncker est d’améliorer ce marché unique via les moyens numériques d’aujourd’hui, en particulier dans le domaine des services financiers. La Commission annonce avoir identifié trois axes de travail pour mener à bien cet objectif :
- l’accroissement de la confiance des consommateurs et leur responsabilisation lors de l’achat de services,
- la réduction des obstacles juridiques et réglementaires qui affectent les entreprises lorsqu’ils fournissent des services financiers à l’étranger,
- le soutien du développement d’un monde numérique innovant pouvant surmonter certains des obstacles au marché unique.
C’est la quatrième partie de ce communiqué qui nous intéresse le plus (Towards an inovative digital world) : les actions de la Commission concernant les FinTech y sont évoquées.
Action 10 : Sur la base du travail de la task force FinTech et de la consultation publique, la Commission déterminera quelles actions sont nécessaires pour soutenir le développement des FinTechs et d’un marché unique axé sur la technologie pour les services financiers.
Action 11 : La Commission facilitera l’utilisation transfrontalière de l’identification électronique et la portabilité du KYC basée sur eIDAS[1] pour permettre aux banques d’identifier leur clients numériquement.
Action 12 : Le Conseil surveillera le marché de la vente à distance pour identifier les risques potentiels pour le consommateur et les opportunités d’affaires sur ce marché et, sur cette base, décider de la nécessité de modifier les exigences relatives à la vente à distance (y compris la divulgation[2]).
Le projet pilote de la Commission : un observatoire des blockchains
Dans une note datée du 18 avril, la Commission Européenne a dévoilé au Parlement, au Conseil, à la Banque Centrale, au Comité Economique et Social et au Comité des Régions son projet pilote centré sur la régulation des blockchains.
Dans le contexte du Groupe de Travail Horizontal sur les FinTechs et les Technologies de Registres Distribués (DLT), le Parlement Européen a mandaté la Commission Européenne pour implémenter un projet Pilote afin de bâtir expertise technique et capacité régulatrice. La Commission Européenne a l’intention de lancer un appel d’offre pour un contrat de service afin de mettre en place un Observatoire des Blockchains de l’UE.
Il s’agira à la fois d’un Observatoire et d’un Forum pour recueillir des opinions et exprimer les préoccupations autour des blockchains et des DLTs. Il aura l’ambition de devenir un centre d’expertise de l’UE pour discuter de sujets d’avenir autour de la blockchain et développer des cas d’usages pouvant être intéressants pour l’UE.
L’objectif sera d’informer et d’aider la Commission Européenne à comprendre quel rôle – le cas échéant – les autorités publiques européennes devraient jouer pour encourager le développement et la prise en charge de ces technologies et formuler des recommandations politiques connexes.
A cette fin, l’Observatoire devrait :
- Fournir un aperçu à jour des initiatives pertinentes s’appuyant sur la blockchain ou les DLTs à travers le monde.
- Suivre de près les développements de cette technologie et les challenges et opportunités relatives à l’industrie européenne, les citoyens et les gouvernements.
- Développer de l’expertise sur des sujets transversaux tels que l’infrastructure, les mécanismes de gouvernance et de validation, les smart-contracts, les challenges en matière de régulation et de législation, l’interopérabilité et les standards.
- Construire et animer une plateforme pour la communauté blockchain européenne.
- Explorer des cas d’usage possibles à valeur ajoutée au niveau de l’UE.
Le budget estimé est de 500 000 € sur une période de deux ans. L’appel d’offre sera publié lors du deuxième trimestre 2017 sur TED eTendering.
La constitution de ce groupe de travail et de cet observatoire est une initiative cruciale pour les institutions européennes à l’heure où le secteur des nouvelles technologies financières, et en particulier des monnaies numériques pair-à-pair et décentralisées, connait une très forte croissance et suscite l’intérêt des plus importants acteurs économiques tout comme celui des simples citoyens.
Les préoccupations quant au cadre de régulation des FinTechs sont variées et donneront lieu à de nombreux débats.
D’un côté nous avons l’Autorité Européenne des Marchés Financiers qui juge une régulation du secteur prématurée, tandis que le Comité Mixte des Autorités Européennes de Surveillance (composé de représentants de l’EBA, de l’EIOPA et de l’AEMF) insiste sur les risques voire les menaces que font peser ces technologies sur l’Eurosystème… Ces positions seront exposées en détails dans un futur article.
Crédits photo : The European Commission – Berlaymont Building, par Glyn Lowe – Licence Creative Commons
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